Gods & Beasts • Rémi Chapeaublanc (série)


par Gérald Vidamment, le Mercredi 22 Février 2012


LE RÉVÉLATEUR #11. Auteur du dossier sur la photo de voyage, publié dans Compétence Photo n°20, Rémi Chapeaublanc avait rapporté de son périple au Népal une série intitulée "Touriste". Cette fois, c'est en Mongolie que Rémi est allé chercher le contact humain. "Un pays où l’Homme n’a pas désacralisé la Nature". Il nous revient avec une série d'images étonnante, empreinte d'une réflexion sur la relation entre l'homme et l'animal. Qui sont les bêtes ? Qui sont les dieux ? "Gods & Beats" n'y répond pas. Il nourrit en revanche la réflexion de chacun. Et nous place, inexorablement, face à nos choix.


© Rémi Chapeaublanc - Tous droits réservés
Lorsque Rémi Chapeaublanc m'a parlé la première fois de son voyage au Népal, j'avais été interpelé par son choix. Il avait retenu ce pays en raison du peu de connaissances qu'il en avait. Une volonté en somme de découvrir une terre nouvelle pour lui. Mais alors, pourquoi avoir choisi cette fois la Mongolie comme destination ? Était-ce pour la même raison ? "Non, cette fois-ci le procédé a été assez différent, car c'est plutôt la Mongolie qui a choisi cette série. Je ne vais pas mentir, j'avais bien une idée de série en allant en Mongolie, que j'ai longuement réfléchis pendant les deux mois de trajet à moto. Mais une fois arrivé sur place, je me suis aperçu que ça ne collait pas, pas avec ce pays, pas avec cette culture. Du coup, je me suis laissé le temps d'y vivre un peu avec les familles. Et c'est en vivant avec les familles que j'ai commencé à me questionner sur le rapport Homme/Animal, qui était si particulier ici. C'est de là qu'est né cette série, directement en Mongolie", me confie-t-il.

Les récentes séries de Rémi, telles que "Touriste", présentent des portraits, le plus souvent rapprochés, et très contrastés. On ne fait presque qu'un avec ses sujets. Pourquoi ce choix d'une telle proximité, et de cette lumière très dure ? Là encore, Rémi n'a rien laissé au hasard. "Ce choix, à la fois contrasté et rapproché, comme tu le décris bien, est là pour "confronter" le spectateur avec mon sujet. Je ne veux pas lui laisser le choix de pouvoir détourner les yeux. C'est un travail de mise en lumière que j'avais expérimenté au Népal, et que j'ai perfectionné ici en Mongolie avec du matériel beaucoup plus lourd et plus précis. Cette mise en lumière est ma façon de faire ouvrir les yeux aux gens, sans que plus rien ne puisse les distraire. J'aimerais que le spectateur se perde à son tour dans ces regards si humains. Dans cette série ça va encore plus loin, vu que je positionne le spectateur comme juge : à lui de décider si ce portrait sera divin ou bestial."

On pourrait enfin s'interroger sur le parti pris d'occulter l'environnement qui habille le sujet. La Mongolie renvoie l'image d'une nature préservée et de vastes pleines. Mais comme le souligne Rémi, qu'on ne se méprenne pas : "Ces portrait n'ont aucunement été détourés, ni même positionnés devant un fond noir ; c'est cette mise en lumière qui a créé naturellement, via le procédé photographique, la disparition de l'environnement. C'est ma manière à moi de symboliser l'attention extrême, celle qui fait qu'on en oublie ce qu'il y a autour. Mais on peut se poser la question, pourquoi les habitants de Mongolie "devraient" plus être photographiés devant leur environnement, aussi magnifique soit-il, plutôt que leurs confrères européens ? Ce que je veux dire par là, c'est que j'ai fait ce voyage principalement pour aller à la rencontre des gens ; j'y ai donc très naturellement photographié ces "hommes" et non pas leurs vastes plaines.

Gérald Vidamment

© Rémi Chapeaublanc - Tous droits réservés

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